« Love in Vain » par Mezzo et Jean-Michel Dupont

« Love in vain » est un majestueux album paru aux éditions Glénat, retraçant le parcours du bluesman Robert Johnson. Le scénario de Jean-Michel Dupont et les dessins de Mezzo nous livrent une sombre biographie de grande intensité. Sombre de part la description des conditions de vie pour la population noire américaine du début du XXe siècle, période durant laquelle se déroula les vingt-sept années d’existence de Robert Johnson. Sombre aussi par la force du noir présent dans les cases et planches de Mezzo.

Robert Leroy Johnson.

Tout l’album est raconté du point de vue d’un mystérieux narrateur. Robert Leroy Johnson est né le 8 mai 1991 dans le delta du Mississippi. Sa mère élève, seule, ses enfants. Ouvrière agricole dans les champs de coton, elle peine à subvenir aux besoins de sa famille. La scolarité de Robert Johnson s’achève assez vite, suite à des problèmes de vue. Il commence a travailler lui aussi pour l’industrie du coton, mais fréquente aussi les juke-joint : cabarets plus ou moins clandestins réservés à la communauté noire, où il s’adonne avec succès à la guitare et l’harmonica. Jeune marié, il perd, à dix-neuf ans, sa femme et l’enfant qu’elle portait. C’est cette tragédie qui l’incite à se lancer sur les routes.

Hâbleur, séducteur impénitent, Robert Johnson parcourt alors le sud des Etats-Unis, vivant de sa musique. Il rencontre alors Ike Zinnerman qui deviendra son mentor, mais aussi les bluesmen Son House, Emore James, Honeyboy Edwards, Howlin’ Wolf, Menphis Slim, Calvin Frazier et Johnny Shines avec lequel il s’associera pendant un temps.

Remarqué par le producteur H.C. Speir, il enregistre ses  premiers morceaux en novembre 1936. Sa réputation s’amplifie et il commence à tourner dans le nord du pays. Il retournera dans le Mississipi vers la fin des années trente, où il mourra en 1938, vraisemblablement empoisonné par un rival amoureux. Et la légende peut commencer.Déjà, de son vivant, Robert Johnson avait l’habitude d’enjoliver la réalité se prétendant le frère du guitariste Lonnie Johnson. C’est lui-même qui aurait lancé la rumeur de sa rencontre avec le diable, à un croisement de route, pour expliquer sa rapide maîtrise de la guitare et sa capacité à reproduire sur cet instrument n’importe quel morceau de musique de manière quasi instantanée.Toujours sous la narration tutélaire du ténébreux récitant, l’album se termine sur la renaissance de Robert Johnson au travers de la redécouverte de sa musique, grâce à de jeunes musiciens comme Éric Clapton ou les Rolling Stones.De la miséreuse et triste réalité du monde ségrégationniste du sud des États-Unis à la diffuse omniprésence des traditions vaudous, le travail de Jean-Michel Dupont et de Mezzo retranscrit magistralement cette époque. La volonté des auteurs fut de décrire un homme, pauvre, dans les années 1930, avec ses qualités et un grand talent, mais de mettre aussi ses défauts en relief, lesquels le mèneront à un destin tragique.Cette édition à l’italienne laisse respirer les dessins de Mezzo. Des campagnes sudistes aux villes du Nord, chaque dessin fourmille de détails : motifs des robes féminines, finesse des étiquettes de bouteilles, publicités murales, affiches de concerts… Son utilisation du noir sert tout aussi, merveilleusement, l’ambiance lourde et surnaturelle des croyances païennes du Sud.

À noter que des crayonnés sont proposés dans un cahier final, présentant les sept chansons écrites par Robert Johnson, accompagnées de leur traduction.

Brigh BARBER

«  Love in Vain » par Mezzo et Jean-Michel Dupont

Éditions Glénat (19,50 €) – ISBN : 9782344003398

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